Résultats des études commandées dans le cadre de la révision totale de la loi sur l’alcool

Berne, 30.06.2010 - La révision totale de la loi sur l’alcool a été mise en consultation aujourd’hui par le Conseil fédéral. Dans le cadre des travaux préparatoires, la Régie fédérale des alcools (RFA) a commandé trois études externes. Le problème des offres de boissons alcooliques à très bas prix a été examiné avec attention conformément à une décision du Conseil fédéral. Deux expertises juridiques arrivent à la conclusion que l’introduction de prix minimaux n’est compatible ni avec la Constitution suisse, ni avec l’accord de libre-échange avec l’Union européenne. Un sondage montre en outre que l’utilité d’une telle introduction serait réduite puisque les jeunes Suisses bénéficient d’un pouvoir d’achat très élevé.

Certaines formes de consommation d’alcool observées auprès des jeunes en Suisse sont préoccupantes. L’apparition de nouveaux comportements tels le «binge-drinking» et les «botellónes» représente des risques majeurs. Afin de dresser un diagnostic aussi précis que possible des problèmes actuels en vue de la révision totale de la loi sur l’alcool, la RFA a chargé l’institut LINK de réaliser une étude représentative. Pour ce faire, 2000 interviews ont été menées en 2009 auprès des 16 à 34 ans.

Concernant la répartition des boissons alcooliques consommées, l’étude LINK indique que, sur les trois catégories, à savoir la bière, le vin et les spiritueux, qui représentent près de 95 % des alcools consommés, les deux premières totalisent à elles seules 86 % de la consommation des 16-34 ans. La consommation des spiritueux reste cependant forte. L’étude justifie ainsi l’approche préventive qui tente d’introduire davantage de cohérence entre les trois catégories de boissons alcooliques quant à leur régulation sur le marché suisse.

Sur le plan financier, l’étude atteste que les jeunes dépensent beaucoup pour l’alcool. Les calculs montrent, par exemple, qu’une bouteille de spiritueux de 7 dl est considérée par les personnes interrogées comme trop chère si son prix avoisine 30 francs. L’étude indique ainsi qu’il faudrait instaurer un prix minimal aussi élevé que possible, afin d’obtenir une baisse quantifiable de la consommation d’alcool dans la tranche d’âge concernée. Une augmentation modérée ne permettrait d’influencer le comportement des jeunes en matière de consommation d’alcool que dans une moindre mesure.

L’étude LINK démontre également que les prescriptions régissant les limites d’âge (16 ans pour le vin et la bière, 18 ans pour les spiritueux) sont souvent contournées en pratique, que ce soit dans les lieux de consommation ou les magasins. Pour limiter ce genre de procédé, on a davantage recours à des achats tests. Les résultats sont encore plus inquiétants lorsqu’il s’agit de transmission de boissons alcooliques à des mineurs une fois l’achat effectué: parmi les adultes interrogés, plus de 30 % acceptent en effet d’acheter de l’alcool pour le compte de mineurs.
L’étude LINK ne permet toutefois pas de conclure à une tendance manifeste aux rassemblements dans les lieux publics comme les parcs pour y consommer de l’alcool. Les domiciles privés et les établissements publics tels que les restaurants, bars ou discothèques restent les lieux de consommation privilégiés des jeunes Suisses de 16 à 34 ans.

Incompatibilité des prix minimaux avec la Constitution et l’accord de libre-échange

En vue de la prochaine révision totale de la loi sur l’alcool, le Conseil fédéral a commandé, le 22 avril 2009, une étude sur la création de bases légales pour des mesures contre les offres d’alcool à très bas prix. La définition de prix minimaux et la perception de taxes d’incitation ont ainsi été envisagées. La compatibilité de ces mesures avec l’accord de libre-échange entre la Suisse et l’Union européenne, d’une part, et avec le principe de liberté économique défini dans la Constitution, d’autre part, a été examinée en 2009 dans deux avis de droit établis par Astrid Epiney, professeur à l’Université de Fribourg. Dans ces deux études, le professeur Epiney conclut que l’instauration de prix minimaux et de deux des trois variantes de taxes d’incitation proposées est incompatible tant avec l’accord de libre-échange qu’avec la Constitution fédérale.

Dans son premier avis de droit, le professeur Epiney considère que l’instauration d’un prix minimal pour les boissons alcooliques n’est pas compatible avec l’accord de libre-échange entre la Suisse et l’UE, car cette mesure doit être assimilée à une restriction à l’importation. De plus, elle constitue une discrimination matérielle, car les boissons alcooliques vendues à bas prix en Suisse sont surtout des produits importés, tandis que les alcools indigènes sont dans leur grande majorité des produits plutôt chers. L’introduction de prix minimaux pour les boissons alcooliques restreint en outre considérablement la liberté économique garantie à l’art. 27 de la Constitution fédérale et entraîne une distorsion de la concurrence. Une justification fondée sur la protection de la santé contreviendrait au principe de la proportionnalité, étant donné que des mesures moins sévères pourraient entrer en ligne de compte (par ex. augmentation généralisée de l’impôt à la consommation).

Taxes d’incitation: aucune variante admissible contre les offres à très bas prix

Dans son second avis de droit, le professeur Epiney conclut que sur les trois variantes proposées, tant la taxe d’incitation indexée sur un prix de référence que la taxe d’incitation sous forme de majoration dégressive du prix à la consommation contreviennent à l’accord de libre-échange entre la Suisse et l’UE. Ces deux mesures constitueraient une discrimination matérielle fondée sur la provenance du produit. Ce genre de taxe restreint en outre la liberté économique garantie par la Constitution fédérale et entraîne une distorsion de la concurrence. Une taxe d’incitation indexée sur la teneur en alcool ne pose en revanche aucun problème de discrimination matérielle. Par conséquent, elle est compatible avec l’accord de libre-échange entre la Suisse et l’UE. Cette mesure purement économique s’accorde également avec la Constitution fédérale, mais elle s’applique toutefois à l’ensemble des boissons alcooliques et pas seulement aux produits très bon marché.


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Régie fédérale des alcools (bis 12.2017)
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