La dissémination de plantes transgéniques – Critères éthiques

Berne, 12.12.2011 - Novembre 2013 est l’échéance du moratoire interdisant la culture à but commercial de plantes génétiquement modifiées. Une majorité de la Commission fédérale d’éthique pour la biotechnologie dans le domaine non humain (CENH) estime que les connais-sances sont encore insuffisantes pour évaluer convenablement les risques liés à une dissémination commerciale. La Commission expose ses arguments dans ce document et y formule les critères éthiques applicables aux disséminations expérimentales et commerciales de plantes transgéniques.

Personne, ou presque, ne conteste que la dissémination de plantes transgéniques comporte certains risques. Cependant, la nature de ces risques et leurs conséquences pour l'utilisation de ces plantes ne font pas l'unanimité. Dans sa prise de position, la CENH montre que c'est le modèle employé pour décrire les plantes transgéniques qui est déterminant pour l'évaluation des risques qu'entrainent leur dissémination.

Le premier modèle analysé par la CENH considère que les plantes transgéniques représentent la somme de la plante d'origine ayant servi de récepteur pour les gènes modifiés et des propriétés ajoutées par génie génétique. Il présuppose que la plante d'origine est connue. Quant aux produits des gènes ajoutés désormais synthétisés par la plante transgénique (p. ex. toxines ou protéines), il ne faut étudier leurs effets qu'en l'absence de données d'autres sources. La CENH estime que ce modèle est trop réducteur.

Le deuxième modèle suppose que les plantes transgéniques peuvent avoir, en plus des effets recherchés des effets involontaires et imprévus qui sont la conséquence, d'une part, des interactions régulatrices et physiologiques complexes au sein de la plante et de ses cellules, d'autre part, de modifications induites par l'environnement. Contrairement au premier modèle, celui-ci amène à conclure que les connaissances manquent pour une évaluation définitive des risques. Il est seulement possible d'énoncer des probabilités de scénarios de dommages. Les plantes transgéniques représentent donc une situation typique de risque. Elles doivent être évaluées à l'aide d'un modèle probabiliste.

Cette conclusion n'est pas sans conséquences pratiques. La majorité de la CENH est d'avis que les plantes génétiquement modifiées peuvent être disséminées à titre expérimental ou commercial uniquement à deux conditions. Premièrement, on dispose des connaissances nécessaires pour évaluer les risques et, deuxièmement, ces risques peuvent être raisonnablement exigés de tiers qui y sont exposés. Il s'ensuit une obligation de procéder par étapes, obligation qui ne s'applique pas seulement aux disséminations expérimentales, mais également aux disséminations commerciales. Un suivi permanent doit permettre d'identifier les effets involontaires, non désirés et imprévus à un stade aussi précoce que possible et d'adapter l'évaluation du risque en conséquence.

Cette procédure par étapes est justement celle que prévoit la législation suisse. Toute proposition de l'assouplir ou d'y renoncer au profit d'une procédure d'autorisation simplifiée serait une erreur.

L'initiative populaire « pour des aliments produits sans manipulations génétiques » a été acceptée en novembre 2005. Elle demandait de renoncer à cultiver et à mettre en circulation des plantes et parties de plantes génétiquement modifiées ainsi que des semences génétiquement modifiées, et ce pour une durée de cinq ans, soit jusqu'à fin novembre 2010. Le 2 décembre 2005, le Conseil fédéral a décidé de confier au Fonds national suisse (FNS) la réalisation d'un programme national de recherche (PNR) intitulé « Utilité et risques de la dissémination des plantes génétiquement modifiées » (PNR 59). Le rapport final de ce programme de recherche est annoncé pour 2012. En 2009, le Conseil fédéral a décidé de prolonger le moratoire de trois ans, c'est-à-dire jusqu'au 28 novembre 2013, afin de pouvoir s'appuyer sur les résultats du PNR 59 pour décider de la suite de la procédure. A moins d'une reconduction du moratoire, il sera à nouveau possible, dès fin novembre 2013, de cultiver des plantes génétiquement modifiées à des fins commerciales et d'en mettre les produits en circulation.


Adresse pour l'envoi de questions

M. le professeur Klaus Peter Rippe, président de la CENH, tél. 076 433 89 22
Mme Ariane Willemsen, secrétaire générale de la CENH, tél. 031 323 83 83



Auteur

Commission fédérale d'éthique pour la biotechnologie dans le domaine non humain
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