L’origine de nos dents du point de vue de l’évolution

Villigen, 17.10.2012 - Jusqu’à présent, la question de savoir si les premiers vertébrés possédant une mâchoire avaient des dents ou non était sujette à controverse. Mais une équipe de chercheurs internationaux a récemment démontré que le poisson Compagopiscis, un des premiers poissons avec une mâchoire ayant vécu sur Terre, en possédait. Cela permet d’en déduire que dans l’évolution, les dents sont apparues conjointement avec la mâchoire, ou du moins peu après. Le projet s’est fait sous la direction des chercheurs de l’Université de Bristol (Angleterre), et les recherches décisives ayant permis d’analyser les fossiles ont été réalisées sur la Source de Lumière Suisse de l’Institut Paul Scherrer à Villigen (Suisse). Les chercheurs présentent leurs résultats dans la revue Nature.

Pour un joli sourire, il faut une mâchoire et des dents. Mais l’origine de ces parties de notre anatomie n’a été découverte que très récemment, grâce à un accélérateur de particules et à un poisson disparu depuis des millénaires.

Tous les vertébrés à mâchoire vivant aujourd’hui, c'est-à-dire les animaux ayant une colonne vertébrale, ont aussi des dents. On a cru pendant longtemps que les premiers vertébrés avaient certes déjà une mâchoire, mais pas encore de dents. On pensait qu’ils attrapaient leurs proies au moyen de puissantes mâchoires semblables à des ciseaux.

Les dernières recherches effectuées, supervisées par l’Université de Bristol, et publiées aujourd’hui dans la revue Nature, démontrent que les premiers vertébrés à mâchoire avaient déjà des dents. Ce qui laisse penser que dans l’évolution, les dents sont apparues conjointement avec la mâchoire, ou du moins peu après.

Les paléontologues de l’Université de Bristol, du Musée d’Histoire Naturelle de Londres (Natural History Museum) et de l’Université Curtin (Perth, Australie) ont, en collaboration avec les physiciens de l’Institut Paul Scherrer PSI, analysé les mâchoires du poisson préhistorique Compagopiscis.

L’équipe a analysé des fossiles de Compagopiscis et plus précisément la structure et l’évolution des mâchoires et des dents au moyen de la lumière à rayons X à haut pouvoir énergétique produite par la Source de Lumière Suisse du PSI.

Martin Rücklin, de l’Université de Bristol, l’auteur principal de l’articule publié dans Nature, raconte: «Nous avons réussi à rendre visibles toutes les structures intérieures des parties osseuses des mâchoires: tissus, cellules et lignes de croissance, ce qui nous a permis d’étudier le développement des mâchoires et des dents. Nous avons ensuite réalisé des comparaisons avec le développement embryonnaire actuel, et ainsi pu démontrer que les poissons placodermes, auxquels appartient le poisson étudié, possédaient des dents».

Le co-auteur Philip Donoghue, de la Faculté des Sciences de la Terre de l’Université de Bristol, déclare: «Cela prouve de manière évidente que ces premiers vertébrés à mâchoire possédaient des dents. Ces résultats mettent fin au débat sur l’origine des dents».

Zerina Johanson, du Natural History Museum, et co-auteur de l’article, ajoute: «Ces fossiles australiens, magnifiquement préservés, recèlent de nombreux secrets sur notre origine, mais pour les étudier, il a fallu attendre de connaître un processus d’analyse non destructif comme nous avons utilisé ici. Sans la collaboration entre les paléontologues et les physiciens, l’histoire de notre évolution serait encore cachée dans la pierre».

Marco Stampanoni, directeur du groupe de tomographie synchrotron de l’Institut Paul Scherrer et professeur à l’Institut de Technique Biomédicale de École Polytechnique Fédérale de Zurich (ETH), déclare: «Nous avons fait de la microscopie 3D des objets étudiés sans les détruire. Pour cela, nous avons utilisé la lumière synchrotron produite par la Source de Lumière Suisse, une source de lumière à rayons X très puissante. Ce procédé nous permet de générer un modèle numérique parfait du fossile, ainsi que des aperçus détaillés de son intérieur sans détruire le fossile. Normalement, notre méthode nous permet d’obtenir des images haute résolution d’échantillons très petits. Pour cette expérience, nous avons modifié le déroulement de la prise de données et les algorithmes de reconstruction afin d’agrandir le champ de vision tout en maintenant une bonne résolution».

Les travaux ont été financés par le septième programme cadre de recherches européen (EU Framework Programme 7), le Conseil britannique de Recherche environnementale (Natural Environment Research Council) et l’Institut Paul Scherrer.

Texte basé sur une notification du service de presse de l’Université de Bristol

Publication originale:
«Development of teeth and jaws in the earliest jawed vertebrates» (Le développement des dents et mâchoires chez les premiers vertébrés à mâchoire)
Martin Rücklin, Philip C. J. Donoghue, Zerina Johanson, Kate Trinajstic, Federica Marone, Marco Stampanoni
Nature, Advance Online Publication 17 octobre 2012; DOI: 10.1038/nature11555

Vous trouverez des photos à haute résolution sur http://psi.ch/LcqA


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Auteur

Institut Paul Scherrer


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