En cette année 2010 décrétée par l'ONU « Année internationale de la biodiversité », la pomme de terre a détrôné le maïs pour occuper le 3e rang des espèces vivrières mondiales, après le blé et le riz. Et pourtant, sa biodiversité est grandement menacée. A l'échelle suisse, il suffit de se promener au rayon légumes des grandes surfaces pour s'apercevoir que seules 4 ou 5 variétés sont proposées aux consommateurs. Or, il existe des milliers de variétés de pommes de terre.

Assainir, reproduire, conserver

La station de recherche Agroscope Changins-Wädenswil ACW, dans le cadre de son mandat de conservation des ressources génétiques de la pomme de terre, travaille inlassablement à assainir d'anciennes variétés malades, à les reproduire et à les conserver. Ce travail de longue haleine, commencé il y a 12 ans, a permis au laboratoire de biotechnologie d'ACW de « sauver » quelques centaines de variétés de pommes de terre ces dernières années, dont la culture avait été abandonnée car les tubercules étaient atteints de graves viroses. En 2009, 17 anciennes variétés ont été remises sur le marché de niche, répondant aux doux noms de Benedetta, Christa, Saskia, Baselbieter Müsli, Jakobi, Weltwunder, etc. Ce projet s'est fait avec Pro Specie Rara, qui se charge de distribuer les variétés aux producteurs, en vue d'une culture à plus large échelle.

Les atouts de la culture in vitro

Pour ce travail d'assainissement et de conservation, ACW recourt à la culture in vitro. Cette technologie utilise de menus morceaux de plante (fragments de feuille, extrémités de tiges, bourgeons, etc.) comme source de matériel et les cultive sur différents milieux nutritifs. L'utilisation de ces fragments permet de raccourcir le cycle de reproduction et d'en augmenter la fréquence. Des plantes peuvent ainsi être produites en des milliers d'exemplaires dans un laps de temps relativement court (quelques mois). Les atouts principaux de la culture in vitro sont ainsi :

une reproduction rapide
la conformité variétale
un état sanitaire garanti

La multiplication du matériel végétal sain peut se réaliser tout au long de l'année, à l'abri des aléas météorologiques, et des contaminations virales. En effet, la reproduction traditionnelle de la pomme de terre est souvent entravée par des infestations bactériennes, des contaminations par des champignons et des virus. S'il est possible de lutter contre les champignons et les bactéries, il n'existe pas de méthodes applicables à la pratique courante pour combattre les infections virales. Le seul moyen, en dehors de l'obtention des cultivars résistants, est de régénérer les plantes malades par la culture de méristèmes (organes formant les extrémités des tiges), seule ou en association avec un traitement à la chaleur (thermothérapie).

Conservation de génotypes

La biotechnologie végétale permet également de préserver les pommes de terre des pertes de matériel dues aux contaminations par des microorganismes pathogènes. En miniaturisant les organes de conservation à la dimension des microplantes, microtubercules, bourgeons axillaires, apex ou méristèmes, il est possible de conserver dans un espace minimal un grand nombre d'accessions. Un millier d'exemplaires de pomme de terre pourraient être conservés par mètre carré si l'on maintenait le matériel végétal sous forme de semences dites artificielles (bioencapsulation).

La culture in vitro redonne vie à d’anciennes variétés de pomme de terre suisses