Par exemple en 2007, lorsque les experts de l’Empa ont procédé à la reconstitution du crâne fossilisé d’un rhinocéros préhistorique à l’aide de la tomographie assistée par ordinateur (TAO). Comme les tubes à rayons X utilisés par l’Empa traversent particulièrement bien les matériaux, ils permettent aussi d’examiner des fossiles de taille assez importante. Les données fournies par la tomographie ont aidé le préparateur à différencier les sédiments des os fossilisés. De plus, la tomographie a permis de mettre en évidence que cet animal était en train de perdre ses dents de lait et qu’il devait ainsi s’agir d’un bébé rhinocéros.

«Les cas exotiques de ce genre sont cependant rares», explique Alexander Flisch du laboratoire «Electronique/Techniques de mesure/Fiabilité». Neuf commandes sur dix proviennent de l’industrie qui a recours à cette technique d’essai non destructive pour déceler par exemple des défauts de matériau éventuels. Mais aussi lorsque les plans d’une pièce n’existent plus ou que le fabricant n’en dispose pas, la TAO est utile pour rendre visible la structure de la pièce. L’ordinateur établi un modèle en trois dimensions à partir duquel la pièce peut être fabriquée.

Pourquoi l’industrie a-t-elle besoin de l’Empa

La tomographie industrielle permet aussi de mettre en évidence la répartition des différentes matières dans un échantillon. Par exemple la distribution des fibres dans un béton renforcé de fibres ou celles de particules de polluants recueillies sur un filtre à particules. L’industrie alimentaire elle aussi y a recours, comme le relate Flisch: «Nous avons tomographié un morceau de Toblerone pour déterminer la distribution des inclusions d’air et des morceaux de nougat. Pour les clients de l’industrie de la construction, la TAO permet par exemple de constater si le malaxage d’un béton ou d’un bitume est optimal ou non. Le principe de la tomographie industrielle, identique à celui de la tomographie médicale, consiste à enregistrer des coupes radiologiques sur ordinateur pour ensuite reconstituer une représentation 3D à partir de ces images bidimensionnelles de l’objet examiné. Mais la tomographie industrielle est nettement plus précise que la tomographie médicale qui doit se soucier des doses de rayons reçues par le patient. Alors qu’une TAO médicale ne dure qu’environ 90 secondes et montre sur les coupes tout ce qui est important pour le médecin, la durée d’une TAO industrielle peut durer de quelques minutes à plusieurs heures suivant le problème posé. Par contre elle permet par exemple de déceler immédiatement un défaut de 25 micromètres sur une brasure de quelques millimètres. L’Empa possède l’un des trois plus grand tomographes industriels d’Europe qui peut scanner des pièces atteignant jusqu’à deux tonnes, telles que des moteurs de camions. Et grâce à leur pouvoir de pénétration élevé, les tomographes de l’Empa permettent aussi de radiographier des matériaux très denses.

L’Empa exploite encore des tomographes à faisceau conique assurant une saisie de données tridimensionnelle. Ces tomographes ne procèdent pas à des coupes bidimensionnelles mais enregistrent quelques centaines de projections de l’objet alors que celui-ci effectue une rotation de 360 degrés sur lui-même. A partir de ces projections, l’ordinateur reconstitue ensuite une image volumique de l’objet.

Tout ce qui peut passer dans le tomographe

Dans un concours d’applications, organisé à l’occasion de la manifestation des vingt ans de la tomographie industrielle à l’Empa «Un regard à l’intérieur des choses», l’équipe de Alexander Flisch a recherché les idées de CAO les plus originales. Les auteurs des propositions les plus intéressantes, telles que l’intérieur d’un automate anthropomorphe jouant de la trompette, d’une masse pierreuse archéologique –dans laquelle on a découvert une poêle – ou encore la taille et la distribution des trous dans un fromage suisse, se sont vus offrir une tomographie gratuite.

L’ingénierie inverse d’un moteur de moto de course est aussi un bel exemple de succès obtenu grâce à la TAO. Un constructeur de moteurs de course disposait bien d’un moteur original – mais plus de ses plans de construction. Flisch et son équipe ont alors réalisé une tomographie de ce moteur. Avec le modèle tridimensionnel fourni par l’ordinateur, le constructeur a poursuivi son développement. Après cela, à partir du modèle livré par l’ordinateur, un moule de fonderie en sable a été réalisé par frittage laser de sable enrobé de résine. Avec ce procédé, le laser solidifie la masse couche par couche de sorte qu’à la fin de l’opération le sable superflu non solidifié s’élimine par simple secouage, fournissant ainsi un moule de coulage exact. Une stratégie qui s’est révélée payante puisque ce constructeur a par la suite remporté avec ce moteur plusieurs épreuves du championnat du monde.

La vie intérieure des choses: Les 20 ans de la tomographie industrielle à l’Empa